samedi 30 novembre 2013

Le tutorat et les MOOCs

Un modèle économique émergent : le tutorat

La monétisation du tutorat et de la notation pourrait permettre aux plate-formes de toucher une commission sur les sommes versées au tuteur par l’étudiant, et ainsi d'amortir une partie des frais engagés dans la mise en place des MOOCs. Le tuteur pourrait jouer plusieurs rôles : 1- malgré le développement de plus en plus pointu de logiciels de corrections automatisée, certaines tâches restent “humaines, non “automatisables”.
2- le tuteur pourrait assurer les retours sur les productions. L’objectif principal d’un MOOC étant la formation, l’évaluation doit avoir un caractère formateur et permettre au participant de s’améliorer 3- le tuteur pourrait assurer l’aide à la réalisation des devoirs demandés par le Mooc, comme cela se fait dans le système classique du soutien scolaire. Les forums sont certes utiles pour assurer une entraide entre participants. Mais comme le souligne Mathieu Cisel, “on risque de voir une copie collective à mille exemplaires, voire un travail collectif”. 4- enfin, le tuteur pourrait assurer le maintien de la motivation de l’étudiant : le tuteur qui guide, pose des questions, demande des comptes, ... permet aux participants de ne pas décrocher, de se sentir accompagnés. Il est envisageable de vendre le tutorat en tant que tel : des entreprises se sont penchées sur le sujet et quelques unes se sont lancées sur ce créneau (ex : hellomentor) Le tutorat pourrait pousser les créateurs de MOOCs à repenser leur modèle d'ouverture/gratuité. Pour finir, le tutorat par les pairs peut être assuré par d’anciens apprenants, ce qui se pratique déjà dans de nombreux masters en ligne (aussi bien en France qu'à l'étranger) : certains diplômés assurent le tutorat pour la promotion suivante..

Focus : MOOCs côté apprenant

FUN

FUN, une initiative française

35 000 inscrits aux cours en ligne gratuits de France Université Numérique (FUN). C'est le bilan annoncé par LeFigaro.fr, pour les débuts de la première plateforme française portée par l’Etat, et dont les sessions démarreront avec l'année 2014. En effet, sept domaines, allant des sciences humaines à l'environnement, en passant entre autres autres par le management ou la santé, y seront développés en 25 cours. Ces derniers, réalisés en collaboration avec les universités et grandes écoles françaises (Sciences Po, Ecole Polytechnique, Institut Mines-Telecom, Université Panthéon-Assas Paris II, ...) ne donneront pas lieu à l'obtention de diplômes, mais proposeront des évaluations.   
Comme pour les autres plateformes, le modèle économique de FUN reste à fixer. Sont envisagés, à l'instar des acteurs anglo-saxons, la monétisation des services à terme, les enrichissements payants, la revente des données personnelles des étudiants aux recruteurs, la facturation de la visibilité donnée aux établissements et le développement d'offres de formation continue rémunératrices.



FLOTs ou Moocs francophones

FLOTs : les MOOCs francophones


L'Université de Montréal et ses deux écoles affiliées, HEC Montréal et Polytechnique Montréal,  l'École normale supérieure, l'École normale supérieure de Lyon, l'École polytechnique, l'École polytechnique fédérale de Lausanne et l'Université catholique de Louvain viennent de lancer, en Novembre 2013, le portail OCÉAN, une offre francophone de FLOTs (Formations en Ligne Ouvertes à Tous). Ces FLOTs sont en langue française, et sont sélectionnés pour leur qualité scientifique et pédagogique. Les critères de sélection comprennent également la qualité scientifique du contenu, la qualité formelle, le niveau d'interactivité et la pertinence dans l'offre globale OCEAN. 
A ces exigences s'ajoutent les critères propres aux FLOTs (définition des objectifs généraux et des objectifs spécifiques, adaptation aux formes et aux modes d’attention, etc.). Pour le moment, le portail compte 21 FLOTs. Mais dès janvier 2014, toute institution d’enseignement supérieur pourra soumettre ses cours en ligne massifs et gratuits et ce quelle que soit leur plateforme d’hébergement.
OCEAN souhaite favoriser le développement d'une offre lisible et cohérente de FLOTs en langue française dans le monde. Enjeu de taille pour les quelques 200 millions et plus de francophones (et les 100 millions de personnes qui apprennent la langue) qui pourront y trouver un large choix de cours.  
Les FLOTs représentent donc une alternative aux MOOCs anglo-saxons, en profusion sur le marché de l'éducation.


MOOCs : côté Economie

Est-il envisageable que la gratuité des MOOCS puisse perdurer sachant que les enseignants qui interviennent ont souvent un travail préparatoire très important ? Ne voudront-ils pas être rémunérés pour ce temps passé et leur investissement ? La gratuité actuelle n’est elle pas liée au lancement du phénomène MOOC ? A l'effet de mode ? Les enseignants peuvent utiliser le temps passé au MOOC en temps de recherche mais est-ce toujours possible ?

Des modèles économiques encore à l'étude

Cette gratuité induit, chez les principaux acteurs, un fonctionnement qui ne génère pas de sources de revenus. Le modèle économique des plateformes reste donc instable mais est appelé à évoluer étant donnés les différents investissements réalisés et le coût de fonctionnement qui demeurent conséquents. Pour rentabiliser ces plateformes, quelques pistes semblent envisageables :
1- l’accès aux bases de données, piste sérieusement étudiée par Coursera et Udacity. La plate-forme servirait de niche aux recruteurs, qui, au delà des notes et autres certificats obtenus, visualiseraient les travaux des étudiants, auraient une idée de leurs attitudes (interactions, entraide, sociabilité, ...). Les badges obtenus joueraient un rôle sur un CV classique.
2- Rendre l’accès au cours payant et rompre donc le modèle de gratuité défendu par les géants américains. On peut citer Udemy, qui fait payer partiellement les formations recherchées sur le marché du travail. Les compétences en informatique étant l’exemple le plus représentatif.
3- La vente de licences d’utilisation des ressources de la plateforme en faisant payer les établissements qui souhaiteraient les utiliser (ex : d’après la récente publication du contrat entre Coursera et l’University of Michigan. Entre autres :
- si les cours sont payants,  les universités percevraient entre 6 et 15% des revenus, en fonction de la durée du cours, le reste revenant à la plate-forme. - Coursera ne rétribue pas les enseignants mais leur laisse la possibilité de promouvoir, sur sa plateforme, leurs livres sur lesquels ils touchent des droits d’auteurs.
- la certification, en ligne ou en présentiel)
4- La mise en place de services Premium comme le tutorat. La plate-forme prendrait une commission sur les sommes versées au tuteur par le participant. 
5- Vendre la licence d’utilisation de la plate-forme à des établissements ou des entreprises pour évaluer des étudiants ou des employés prospectifs ou pour la formation des employés. 
6- La sponsorisation des plateformes par des entreprises privées. Si les entreprises sponsors peuvent trouver des avantages à soutenir un Mooc (visibilité, notoriété, …) qu’est-ce qu’il en serait de l’image du MOOC si ses cours sont sponsorisés par une entreprise ?
 

Les MOOCs, un nouvel écosystème ?


L’enjeu majeur pour les universités réside en leur réputation au niveau international. Au delà des plate-formes techniques, des start-up basées sur les nouvelles technologies éducatives ont commencé à fleurir. D'où le succès de Google Hangout pour des réunions à plusieurs, en ligne, ou encore des permettant des rencontres dans la vie réelle, comme Meet up, qui recense plus de 1 500 communautés Coursera à travers le monde. Studyroom, blackboard, pour ne citer que ceux-là, facilitent le travail collaboratif liés aux plates-formes MOOC, proposent des classes virtuelles. George Siemens affirmait, à ce propos, qu' un "univers d'applications, semblable à celui qui s’est mis en place pour Facebook et d’autres sites similaires, est en train de se développer pour les MOOC, que l'on pourrait appeler les MOOC Apps".

MOOCs : côté Pédagogie

L'innovation pédagogique en marche

L’explosion des MOOCs, initiée sur le sol américain et gagnant progressivement l’Europe et la France, amène à poser un regard sur le devenir des modalités pédagogiques et des processus d’apprentissage qui sont mis en œuvre au travers de cette éducation numérique. Le questionnement peut se formuler en termes classiques, comme pour les offres de formation en présentiel - exemple : le modèle pédagogique est-il plutôt à tendance de transmission de contenu ou implique-t-il les apprenants ? Mais il peut lui-même se renouveler à la faveur des nouveaux enjeux pointés par les cours massifs : prenons l’exemple de la remise en question des rapports entre contenus pédagogiques, évaluation et délivrance d’attestation ou autres open badges, qui vient en partie déstructurer les rapports habituels entre l’étudiant, l’institution qui délivre au long cours de la formation et qui va sanctionner le parcours de l’apprenant par un diplôme et enfin le marché du travail sur lequel ce diplôme va être monnayé. À l’arrivée, c’est aussi le processus motivationnel des étudiants qui se trouve affecté.

Des diplômes MOOCs ?



A la question de VentureBeat à Sal Khan, le fondateur de la Khan Academy, une réponse simple : les diplômes classiques ne font pas vraiment partie de la philosophie des MOOCs... Des organismes de certification indépendants pourraient apparaître pour donner plus de crédit à ces nouvelles formations en ligne. Il poursuit en affirmant que la valeur d'un apprentissage se mesure au temps passé à pratiquer, et aux compétences acquises, plutôt qu'à la somme de savoirs engrangés. Pour Khan, une des solutions possibles au besoin réel de disposer d'un moyen simple d'attester de son niveau de compétence sur une échelle reconnue et partagée passerait par les organismes de certification tiers, situés hors du champ académique. Une voie explorée par des startups comme Degreed ou encore Smarterer et ProcterU. Il insiste cependant sur le fait que ces "nouveaux diplômes" ne remplaceront pas ceux délivrés par les universités, mais permettront plutôt de les enrichir.

Les acteurs MOOCs

Outre-Atlantique, l'enseignement  en ligne a commencé à faire parler de lui dès le début des années 2000. Des cours magistraux proposés par le MIT sous forme vidéo, de ceux mis à disposition par Stanford dès 2008, émergera notamment l'offre de la plate-forme Coursera, considéré comme leader du mouvement MOOC. Les interactions entre étudiants, combinées à la multiplicité des ressources d'apprentissage, donnera naissance à l’apprentissage collaboratif portant désormais le nom connectivisme (définition par G. Siemens). Mais c'est le cours d’intelligence artificielle dispensé sur le site de Stanford en novembre 2011 par le professeur de robotique Sebastien Thrun, sur la plate-forme Udacity, qui marque un vrai tournant. Les cours (l’informatique, physique, ...) sont sous forme de courtes vidéos. Outre les tests automatisés permettant d'évaluer les acquis, les étudiants ont à fournir certains travaux tout le long du cursus. Coursera, ne produit pas ses cours mais fonctionne en étroit partenariat avec les universités américaines, canadiennes, australiennes, voire de Hong Kong ou de Suisse et ses cours couvrent toutes les disciplines. Cette forme de partenariat a permis à Coursera de se concentrer sur le développement technique de sa plateforme. Quant à la plateforme Edx, c'est le résultat de l'association du MIT et de Harvard en 2012 la plate-forme edX, suivis par quelques autres tels que Berkley et l'Université du Texas.
En plus de leurs vitrines sur Coursera, quelques universités proposent des MOOC sur leur propre site : Stanford Online héberge le Venture Lab (reposant essentiellement sur le travail en équipe) et Class2go.

Le portail OCEAN regroupe depuis peu les MOOCs francophones, appelés aussi FLOTs ( Formation en Ligne Ouverte à Tous).

FUN, le premier MOOC français, a été dévoilé cet automne et donnera accès aux premiers cours dès Janvier 2014, en collaboration avec les grandes écoles et universités françaises.